top of page
  • Photo du rédacteurMarianne Ducret

Manager vs Parent : même posture ?


Plus je me forme au management, plus je fais des liens avec la parentalité.


Et plus je lis sur la parentalité, plus je fais des liens avec le management.


Ça parait logique en fait; les deux ont une mission similaire, non ? Accompagner le développement d’un individu. Dans la version la plus noble du management en tout cas.


Alors on pourrait dire que le management vise en priorité la performance d’un individu, dans un contexte professionnel, alors que la parentalité vise en priorité l’épanouissement d’un individu, dans un contexte plutôt personnel.


Mais dans les faits, ce cloisonnement n’est pas si évident :


o   Les managers savent que prendre en compte la situation personnelle de leurs collaborateurs permet d’optimiser leurs conditions de travail, de soulager leur charge mentale, et d’améliorer ainsi leur performance.


o  Les parents jouent un rôle fondamental dans les 1ers apprentissages de leurs enfants et posent souvent les bases de leur confiance en eux et de leur performance future. Ils sont par ailleurs soucieux de leur réalisation professionnelle, pour la sécurité financière qu’elle favorise, mais aussi pour la satisfaction personnelle et l’épanouissement qu’elle génère.


Alors si l’intention est proche, qu’en est-il de la posture ? Peut-on dire que le parent et le manager ont une posture identique ?




 

 

  1. Des compétences similaires :


On n’utilisera pas les mêmes termes pour les décrire, mais de nombreuses activités sont assez équivalentes en entreprise et en famille :


o  Animer une réunion d’équipe <=> Animer un repas en famille

o  Définir les objectifs de l’équipe <=> Essayer d'assigner des tâches ménagères à chacun

o  Donner du sens aux décisions managériales <=> Expliquer pourquoi dans la vie c’est important de se laver

o  Gérer les conflits interpersonnels <=> Ecouter la version de chacun et séparer les combattants

o  Tirer vers le haut / Donner du feedback <=> Encourager les enfants à cuisiner / Les féliciter que le gâteau soit moins brûlé que la dernière fois.


Pour mener à bien ces activités, les mêmes qualités sont précieuses pour le manager et pour le parent : Patient, Equitable, Pédagogue, Bon communiquant, Observateur, Constructif,…

 

2. Des missions d’apprentissage communes :


Pour accompagner le développement d’un individu du mieux possible, je vois une succession de phases favorisant l’apprentissage :


o   Phase 1 : « Je fais à ta place pour te montrer » => Enjeu de modélisation

o   Phase 2 : « A toi de faire, je reste à côté » => Enjeu d’expérimentation

o   Phase 3 : « Je te fais confiance, je suis là si besoin » => Enjeu d’autonomisation

o   Phase 4 : « Echange de pratique » => Enjeu de parité


A 1ère vue, ces différentes phases semblent applicables à l’éducation d’un enfant comme à l’accompagnement d’un nouvel arrivant dans l’équipe. A chacune correspondent une intention spécifique et une posture appropriée, qu’il faut savoir adopter. Et l’accompagnant doit aussi savoir identifier quand passer d’une phase à une autre.


Sur ce point, certains écueils semblent comparables, entre parent et manager :


o  Certains auront du mal à lâcher la phase 1 pour passer à la phase 2 : on appellera ça une difficulté à déléguer pour le manager, par souci d’efficacité ou par volonté de garder le contrôle. Pour le parent, il pourra s’agir aussi d’aller plus vite, ou sur la durée, s’apparenter à une posture de sauveur. Dans les deux cas, cela entrave le développement de l’enfant ou du collaborateur en lui envoyant le message qu’il n’est pas capable de faire par lui-même.

 

o  Les adeptes du contrôle, managers ou parents, auront aussi du mal à passer à la phase 3, en laissant l’accompagné gagner en autonomie, évoluer de son côté et faire ses propres choix. La tentation sera grande d’influencer ses décisions et de vouloir garder un œil constant sur ses activités. Là aussi, l’effet sera négatif puisque le message reçu sera « je ne te fais pas confiance ».

 

o  Le passage à la phase 4 sera peut-être plus difficile pour les managers que pour les parents. Si on prend l’exemple d’un enfant qui devient parent à son tour, une forme de parité se met souvent naturellement en place avec ses propres parents, pour comparer leurs expériences. Il sera probablement plus compliqué pour un professionnel qui avait l’habitude de superviser un collaborateur de le voir monter les échelons et arriver à niveau proche du sien, et d’accueillir cette progression avec une sincère camaraderie et un esprit de parité. Quoique. Il pourrait aussi se féliciter de cette réussite, qui est aussi un peu la sienne s’il y a contribué. J’imagine que tout dépend des personnes. Tout comme certains parents ont du mal à lâcher leur posture d’autorité sur leur enfant devenu adulte et père/mère de famille.

 

3. Des enjeux affectifs différents :


Malgré tous ces points communs, il reste une différence de taille entre le manager et le parent : l’enjeu relationnel.


Il semble évident que l’investissement affectif n’est pas le même quand on accueille un jeune diplômé dans l’équipe et quand on accueille un nouveau-né dans la famille.

Dans les deux cas, on va essayer de mettre en place une relation de qualité, mais avec des intentions différentes.


o  Pour le manager, l’idéal est d’avoir avec ses collaborateurs une relation suffisamment bonne pour les fidéliser et permettre une ambiance conviviale dans l’équipe, mais pas trop bonne non plus, pour éviter les écueils du manager-pote, qui peut avoir du mal à se positionner et à assumer certains aspects de sa fonction. Bref, une relation humaine, mais pas trop. La bonne relation doit servir la performance et les intérêts de l’entreprise. Mais elle n’est pas une priorité en soi.


o  Pour le parent, l’idéal est d’avoir avec son enfant une relation d’amour inconditionnel. La bonne relation est une priorité en soi, et sert les intérêts de l’enfant et du parent. L’écueil majeur viendrait plutôt du manque de lien, dont on connait de plus en plus les conséquences sur le développement de l’enfant.


Les enjeux affectifs du manager et du parent apparaissent donc opposés, ce qui génère des postures différentes, avec des points de vigilance spécifiques :


o  Le manager doit avoir une posture d’autorité suffisamment bienveillante pour signifier à ses collaborateurs qu’il les considère, qu’il les perçoit comme des sujets et non des objets de production. Mais en veillant à garder des relations « saines », au service de la coopération et du bon équilibre de chacun.

Il doit garder en tête qu’en étant ainsi figure d’autorité bienveillante, il favorise des projections potentielles de la part de ses collaborateurs. Au-delà des risques de copinage, il existe des risques de surinvestissement affectif, source de grandes souffrances en entreprise. Un salarié qui se donne à fond pour faire plaisir à son manager, pour être à la hauteur de ses attentes et ne surtout pas le décevoir. Pour servir des enjeux affectifs personnels dont il n’a pas forcément conscience. Une belle invitation aux amalgames et au burn-out.

La posture à trouver est donc délicate, à la fois humaine et contractuelle, pour la protection de chacun. Les limites sont à fixer en fonction de chaque collaborateur et des attentes qu’il semble avoir envers son manager.

 

o  Le parent doit avoir une posture d’autorité aimante. C’est-à-dire qu’il utilise son autorité pour servir l’intérêt de l’enfant. Pour le protéger, pour l’aider à grandir. La relation est fondamentalement humaine, même si elle est parfois amenée à être contractualisée quand le niveau d’humanité est défaillant.

L’investissement affectif est indispensable, prioritaire et sans limites. Certes, le surinvestissement affectif peut aussi exister chez les parents, mais ses effets me semblent nettement moins graves que ceux de l'absence de lien.

Comments


bottom of page